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Séparés par des virgules

Le vêtement de la discorde

Professeur de science politique et directeur du Centre Jean-Bodin (CJB), François Hourmant, accompagné de son collègue Erwan Sommerer, vient de publier l'ouvrage Vêtements, modes et résistance.

Après avoir questionné la thématique de la beauté en politique et celle du vestiaire du totalitarisme, François Hourmant s’est intéressé au vêtement comme langage politique. « Qu’il soit visible ou discret, porté par un homme ou une femme, le vêtement nourrit le spectre des résistances et alimente, entre autres, la scénographie des contestations, détaille le directeur du CJB. Cet ouvrage fait suite au 9e congrès des associations francophones de science politique, organisé en 2021 à l’Université Libre de Bruxelles sur le thème de la résistance. »

L’illustration en première de couverture donne le ton. Il s’agit d’un graffiti au pochoir réalisé au Caire par l’artiste et universitaire Bahia Shebab lors du soulèvement égyptien de 2011. Y figurent les phrases « Non au dépouillement du peuple » et « Vive la révolution pacifique » aux côtés d’un soutien-gorge bleu, rappelant ainsi le symbole de la résistance des Égyptien∙nes face à la répression policière, avec cette image qui avait fait le tour du monde.

Les Gilets jaunes à la loupe

La première partie de l’ouvrage est consacrée à l’approche historique du vêtement sous l’angle de la résistance, et la seconde présente le vêtement comme pratiques alternatives et moyens de lutte contre la stigmatisation. Du style « preppy » du mouvement international Réarmement moral à la mode en URSS des pulls portés par Ernest Hemingway, en passant par la tenue ordinaire des militants de la Lutte ouvrière ou encore celle des genderfuck, le vêtement est ainsi passé au crible sous toutes ses formes pendant près de 300 pages. Ces dernières couvrent un spectacle assez large de contestations et de causes défendues (révolution communiste, dénonciation du patriarcat et de l’économie mondialisée, révolte sociale) lors des XXe et XXIe siècles.

« Langage politique, le vêtement relève des ces formes ambivalentes de communication non-verbales qui disent à la fois l’emprise du pouvoir et sa contestation, l’assujettissement des individus mais aussi leur prise de conscience, le poids de la domination masculine et son rejet à l’image de l’histoire politique du pantalon comme l’a montré Christine Bard, professeure d’histoire contemporaine à l’UA », précise François Hourmant.  

Le directeur du CJB a rédigé un chapitre sur le mouvement des Gilets jaunes au prisme du vestiaire. « Il s’agissait de questionner les slogans inscrits sur leurs gilets, qui expriment l’ajustement des colères et des demandes. Entre culture populaire et culture savante, c’est toute la sociologie mosaïque des Gilets jaunes qui se lit dans ces références hétéroclites. »

Au total, dix auteur∙es ont participé à la rédaction de cet ouvrage, dont Djurdja Bartlett (1949-2022). Cette historienne de renommée internationale enseignait au London College of Fashion et avait étudié, dès 2010, la mode au prisme du politique, notamment dans son dernier livre Fashion Politics. « Notre ouvrage s’inscrit dans ce courant des fashions studies mais entend explorer davantage la dimension contestataire associée aux vêtements et leur rôle dans la construction des antagonismes », conclut François Hourmant.

The Conversation

Retrouvez le dernier article de François Hourmant, intitulé Un « bra » d’honneur, publié dans The Conversation, média collaboratif et indépendant.

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