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Deux chercheuses de Mint entrent à l’IUF
Travaillant sur des nanomédicaments innovants et leur mode d’administration, Élise Lepeltier et Émilie Roger-Talibart viennent d’être nommées pour 5 ans à l’Institut universitaire de France (IUF).
Émilie Roger-Talibart et Élise Lepeltier se côtoient au sein du laboratoire MintLe 1er octobre, elles intégreront l’IUF, institut « sans mur » qui rassemble les enseignant·es-chercheur·es français de haut niveau. Elles ont, toutes deux, été nommées au titre de la chaire Innovation, car leurs travaux pourraient déboucher sur des brevets. Elles sont les deux seules de l’Université d’Angers à faire partie de la promotion 2023. Les deux femmes nées en Anjou se côtoient régulièrement au 3e étage de l’Institut de biologie en santé, épicentre de la recherche en santé angevine. « C’est un hasard, on ne savait même pas que l’autre avait déposé une candidature », rigolent les deux membres de l’unité Mint (Micro et nanomédecines translationnelles), laboratoire spécialisé dans le « transport » de principes actifs, via des micro ou nanoparticules.
Un spray contre le cancer du poumon
Au-delà de ces points communs, leur parcours et leurs travaux sont singuliers. Élise Lepeltier, 35 ans, est chimiste de formation. « J’ai découvert les nanoparticules par hasard, suite à une conférence de Patrick Couvreur », spécialiste des nanomédicaments, qui deviendra son directeur de thèse. Pour conclure son parcours à l’École normale supérieure, « j’ai fait mon stage au sein du Laboratoire des biomolécules et j’ai adoré. Le fait de travailler en interdisciplinarité m’a beaucoup plu ». Lors de son doctorat, elle explore un procédé permettant de « faire de nouvelles nanoparticules anticancéreuses, sans excipient, par auto-assemblage. Elles se forment spontanément dans l’eau ».
Après 2 ans de post-doctorat à Sarrebruck, en Allemagne, Élise Lepeltier intègre l’UA en septembre 2015, enseignant la chimie à la Faculté de santé, et poursuivant ses recherches sur les nanoparticules anticancéreuses. Son projet : offrir aux personnes atteintes d’un cancer du poumon l’équivalent de la Ventoline pour les asthmatiques, c’est-à-dire un spray capable de transporter le traitement au plus près de sa cible. « Je travaille sur un anticancéreux déjà utilisé en clinique, que l’on va modifier pour qu’il s’auto-assemble, qu’il soit plus efficace et qu’il cible précisément la tumeur ».
Reste un obstacle à lever : « On a longtemps pensé que le poumon était un milieu stérile. Mais depuis une dizaine d’années, on sait qu’il y a un microbiote local, une barrière naturelle qu’il faut prendre en compte », explique Élise Lepeltier.
À terme, la chercheuse veut aller plus loin, en trouvant le moyen de « traiter les différents cancers au niveau local, en prenant en compte le microbiote. Sur la peau, par exemple, il y a aussi un microbiote spécifique ». Cette ambition est au cœur d’un projet européen qu’elle compte prochainement défendre.
Des traitements innovants à avaler
Émilie Roger-Talibart vise, elle aussi, une bourse de l’European Research Council. Diplômée de la Faculté de pharmacie d’Angers, elle développe « de nouveaux systèmes particulaires pour l’administration par voie orale ».
Avaler un médicament reste le plus pratique. Mais de nombreuses molécules ayant prouvé leur efficacité ne sont pas administrables par ce mode. « Des peptides ont montré un grand intérêt mais, le problème, c’est que si vous avalez un peptide, il va rapidement se dégrader ou ne pas être absorbé », constate la chercheuse de 42 ans. Son idée : mettre dans une « cage » protectrice la molécule active.
Ce principe a été au cœur de sa thèse Cifre, dirigée par Jean-Pierre Benoît et Frédéric Lagarce, et soutenue à Angers en 2009. Durant 3 ans, elle a œuvré, en lien avec un laboratoire pharmaceutique, à la mise au point de vecteurs permettant d’encapsuler des molécules anticancéreuses, en vue d’une prise orale.
Après un détour post-doctoral par l’université de Minneapolis, aux États-Unis, et un premier poste d’enseignante-chercheuse à Strasbourg, Émilie Roger est revenue à Angers. Et a repris ses recherches sur l'administration orale de médicaments. Depuis 5 ans, la maîtresse de conférences travaille sur un nouveau système nanoparticulaire, dont l’élaboration ne nécessite pas de solvants organiques (donc moins toxique), capable d’encapsuler des molécules actives. « L’objectif du projet que j’ai déposé à l’IUF est de suivre cette cage après son ingestion, de regarder jusqu’où elle va dans le système digestif avant d’être dégradée et, donc, de libérer le peptide ».
L’ultime étape de ce projet au long cours sera d’élaborer un comprimé, transportant la cage nanoparticulaire et sa molécule active.
L'IUF, pour une recherche de haut niveau
L'Institut universitaire de France désigne un ensemble d'enseignants-chercheurs sélectionnés par un jury international pour la qualité exceptionnelle de leurs recherches, appelés membres, bénéficiant d'une décharge à hauteur de deux tiers de leurs charges d'enseignement, d'une prime et d'une dotation budgétaire
L'IUF a pour mission de favoriser le développement de la recherche de haut niveau dans les universités et de renforcer l'interdisciplinarité, en poursuivant trois objectifs :
- Encourager les établissements et les enseignants-chercheurs à l'excellence en matière de recherche, avec les conséquences positives que l'on peut en attendre sur l'enseignement, la formation des jeunes chercheurs et plus généralement la diffusion des savoirs.
- Contribuer à la féminisation du secteur de la recherche.
- Contribuer à une répartition équilibrée de la recherche universitaire dans le pays, et donc à une politique de maillage scientifique du territoire.