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Séparés par des virgules

Alexandre Abhervé, les mains dans la chimie

Chercheur à Moltech-Anjou, Alexandre Abhervé étudie l’impact de la chiralité sur des composés chimiques. Objectif : tirer le meilleur parti de matériaux pouvant servir dans l’électronique ou le photovoltaïque de demain.


Alexandre Abhervé travaille sur les cristaux, et les pérovskites halogénées en particulier.
Placez vos deux mains à plat sur une table. La main gauche est l’image miroir de sa voisine. Placez-les à présent l’une sur l’autre, toujours à plat : vous verrez qu’elles ne sont pas superposables, le pouce de la main gauche dépassant vers la droite, et inversement. Cette particularité s’appelle la « chiralité ». Et elle existe en aussi en chimie : un même composé chimique peut avoir deux formes différentes, deux « énantiomères », l’un qui tourne à gauche, l’autre vers la droite. Avec chacun ses atouts.

Au sein du laboratoire Moltech depuis 2016, Alexandre Abhervé imagine de nouvelles architectures et synthétise des composés chiraux qui vont sublimer les propriétés intrinsèques des molécules de base. « La chiralité influence les propriétés du composé, explique celui qui a été nommé chargé de recherche CNRS en octobre 2022. Par exemple, si vous avez une molécule luminescente, émettant une lumière diffuse, le composé chiral peut donner une luminescence polarisée circulairement, tournant à gauche pour un énantiomère, à droite pour l’autre. Cela peut avoir des applications pour la fabrication d’écrans plus efficaces et moins coûteux en énergie, par exemple ».

Pérovskites chirales

Après une thèse à Valence, en Espagne, et plusieurs post-doctorats à Angers auprès de Narcis Avarvari, le chercheur de 34 ans s’intéresse à présent aux pérovskites hybrides, domaine de compétences du professeur Nicolas Mercier, et plus particulièrement aux pérovskites halogénées.

Basées sur un métal et un halogène, les pérovskites halogénées présentent une structure cristalline singulière. Depuis les découvertes d’un chercheur japonais en 2009, elles concentrent l’intérêt de la science car elles constituent un espoir de révolutionner la production d’énergie solaire, qui s’appuie encore aujourd’hui sur le silicium.

« Pour former ces matériaux, il faut insérer un cation organique. Il sert à donner la forme singulière propre aux pérovskites, mais n’a pas beaucoup d’autres fonctionnalités, indique Alexandre Abhervé. Mon projet, que j’ai défendu au niveau européen, c’est de créer des pérovskites halogénées avec un cation organique qui va être chiral – aujourd’hui, ce n’est pas le cas. Et ainsi observer ce que cela change, au niveau de la luminescence ou de la conductivité du composé ».

Le potentiel et les performances des pérovskites chirales, et des matériaux qui peuvent en découler, ont peu été étudiés. « Cela pourrait permettre de faire émerger de nouveaux dispositifs, dans la photonique ou dans la spintronique », pour le transport et le stockage de l’information. Avec toujours la même philosophie : « Utiliser moins d’énergie pour faire fonctionner un dispositif plus efficace ».

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