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Une lecture sociale et non médicale de la santé
Directeur de recherche au CNRS et membre du laboratoire Eso à l’UA, Sébastien Fleuret étudie les comportements et pratiques territoriales en lien avec l’exposition à la maladie de l’ulcère de Buruli.
Depuis 2015, le laboratoire Eso, dont l’UA est l’une des tutelles, a rejoint l’équipe Inserm Atomyca (devenue Incit le 1er janvier 2022) du CHU d’Angers dans leurs recherches concernant l’ulcère de Buruli, une maladie tropicale négligée (MNT) présente en Afrique de l’Ouest et en Australie. Causée par une mycobactérie environnementale, elle se manifeste par des lésions cutanées de la peau et des tissus pouvant atteindre les os des enfants. « Cette maladie a été découverte il y a plus d’un siècle et est réapparue dans les années 1980, précise Sébastien Fleuret. Il est encore difficile de connaître son mode de transmission et de retracer sa chaîne de contamination. Nous savons qu’elle se transmet plus fréquemment à proximité de points d’eau non-aménagés, à débit faible ou stagnant, et souvent obstrués par des plantes aquatiques. »
Ces dernières abriteraient des insectes piqueurs, comme la punaise d’eau, porteurs de la bactérie et qui la transmettrait par piqûre accidentelle. « Les microbiologistes de l’équipe Atomyca nous ont demandé d’analyser les gestes et comportements des habitants au sud du Bénin pour mieux comprendre ce phénomène : c’est tout l’innovation du projet puisque nous menons des enquêtes de terrain en y associant des analyses géolocalisées. » Ce projet est financé par l’ANR à hauteur de 312 000 euros pour une durée de 36 mois, à partir de juin 2022.
Analyser les comportements
Localisation des sites d'études.Sébastien et son équipe vont donc analyser les pratiques quotidiennes des habitants le long du fleuve Ouémé : puisage de l’eau, nettoyage du linge et de la vaisselle, baignade, pratiques hydro-agricole... Une prolongation du travail réalisé dans le cadre du programme GEANT (Identification des facteurs GEographiques et ANThropiques associés à la variation de l’incidence de l’ulcère de Buruli au sud Bénin), piloté par Estelle Marion entre 2017 et 2020. « Nous avions recueillis 500 coordonnées GPS dans les différents espaces de vie (domicile, travail, école, points d’eau et zones humides fréquentées) de 140 patients afin de cartographier pour la première fois leurs déplacements, et donc analyser les risques d’exposition. Nous utilisons aussi des images à hautes résolutions spatiales pour étudier les dynamiques spatiotemporelles de l’occupation et de l’utilisation du sol. »
L’identification de ces types de comportements et activités est essentielle pour caractériser ainsi l’environnement aquatique dans lequel la bactérie se développe, et définir des mesures préventives adaptées et efficientes, en lien avec le Centre de diagnostic et de traitement de l’ulcère de Buruli, installé à Pobé depuis 2004. « Une postdoctorante sera aussi présente sur place pour échanger avec les communautés villageoises dans le cadre d’une approche de modélisation d’accompagnement. Elle analysera notamment avec les habitants les changements d’interactions avec leur environnement aquatique sur les 15 dernières années et les pratiques qui ont pu contribuer à une baisse de l’incidence ou inversement, les risques d’exposition qui peuvent subsister. Elle travaillera ensuite avec les équipes de recherche pour définir des propositions d’aménagements préventifs et adaptées en zones endémiques. »