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Culture et traditions du vin : l’UA pionnière en la matière sur le territoire

En mars dernier, l’Université d’Angers a rejoint la chaire Unesco Culture et traditions du vin. Rencontre avec Valentin Taveau, post-doctorant au laboratoire Temos et à l’origine de cette initiative.

C’est une histoire de paradoxes. Le premier se rapporte à la richesse de l’histoire et du patrimoine viticole de la vallée de la Loire, peu étudiés dans le cadre de la recherche universitaire. Le second concerne Valentin Taveau, post-doctorant au laboratoire Temos – dont le programme VinHistOLoire est financé par le plan France Relance - et à l’origine de l’entrée de l’Université d’Angers au sein de la chaire Unesco Culture et traditions du vin.

Après avoir obtenu en 2016 le master Pratiques de la recherche historique à l'UA - avec pour sujet la jeunesse délinquante dans les institutions d’éducation surveillée au lendemain de la Seconde Guerre mondiale -, Valentin s’est orienté vers une thèse dédiée… aux vins, un peu par curiosité. Initié à l’œnologie par son grand-père, il a dû en réapprendre les bases (viticulture, vinification, commercialisation et consommation) à vitesse grand V lors de sa thèse Cifre avec l’entreprise Orchidée maison de vin (ex-Ackerman). « Ma thèse traite de l’histoire de l’entreprise familiale des vins mousseux Ackerman-Laurance au XIXe siècle et je l’ai soutenue en septembre 2021. »

Un vignoble peu valorisé


Valentin Taveau.

C’est en présentant ses résultats de thèse lors d'une conférence au sein de la chaire Unesco en décembre 2021 que Valentin Taveau rencontra Olivier Jacquet, ingénieur de recherche à l’Institut universitaire de la vigne et du vin. Ils échangèrent sur l’opportunité d’une inscription de l’UA à la chaire. « En discutant avec lui, j’ai compris l’intérêt que pouvait avoir l’UA à rejoindre ce réseau, composé d’universités françaises et étrangères, mais aussi d’écoles de commerce et d’organismes liés à la filière professionnelle. La SFR Confluences a soutenu l'initiative et nous avons été acceptés à l'unanimité le 16 mars. »

La chaire vise à développer la recherche en sciences humaines et sociales sur la vigne et le vin, à mettre en place des parcours de formations de la licence au doctorat avec des thèses en co-tutelle avec d’autres universités, et à permettre l’organisation d'événements scientifiques pluridisciplinaires internationaux. L’UA serait ainsi pionnière en la matière dans le territoire afin de construire l’histoire du vignoble. « Malgré ses 56 000 hectares et un classement du Val de Loire à l’Unesco, le vignoble de la Loire n’est pas assez étudié, en regard de celui de Bourgogne et de Bordeaux, bien que des chercheur∙es du Granem ou de l’Esthua étudient le vin », relève Valentin. Par exemple, l’Université de Bourgogne travaille beaucoup avec les acteurs de la filière : il y a une réelle synergie qui s’est créée dans la recherche, particulièrement en histoire. »

Construire la recherche de demain

En Anjou, les ressources ne manquent pourtant pas. Outre l’important patrimoine architectural vitivinicole, plusieurs maisons de négoce (Ackerman, Chapin & Landais, De Neuville, Rémy Pannier) mais aussi des vignerons (Piard) et des entreprises (Buscher Vaslin) ont déposé leur archives, soit aux Archives départementales de Maine-et-Loire, soit au musée de la Vigne et du vin, à Saint-Lambert-du-Lattay. « La mémoire des acteurs et actrices des vignobles de la Loire est aussi importante : nous devons échanger avec toutes les personnes qui ont travaillé et travaillent dans la filière, de l’ouvrier au patron, du vigneron indépendant au négociant en passant par les caves coopératives. Il faut leur présenter nos recherches et les convaincre de leurs intérêt dans le développement de leurs entreprises et des vignobles ligériens, notamment pour l’œnotourisme ou le commerce à l’export, mais également pour repenser nos modes de production face au changement climatique. Il faut construire ensemble la recherche de demain : nous avons les compétences scientifiques ; ils ont les compétences pratiques. »

La concrétisation du partenariat avec la chaire Unesco pourrait prendre la forme d’un colloque à l’UA à l’horizon 2023-2024. En attendant, Valentin imagine déjà ses futures recherches. « J’aimerais m’interroger sur la production, la commercialisation et la consommation des vins de la Loire aux XIXe et XXe siècles, dans une perspective intersectionnelle qui croise plusieurs questions telles que le genre et l’environnement : ce sont des thématiques qui, appliquées à la vigne et au vin, sont encore peu étudiées en France. »

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