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Enfance : Temos prend soin des témoignages recueillis par la Ciivise
Dans le cadre du programme de recherche « Care », les spécialistes en archivistique de Temos travaillent à sécuriser et mettre en valeur les témoignages de personnes qui ont été victimes d'inceste et de violences sexuelles pendant leur enfance.
De mi-2021 à fin 2023, la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise), coprésidée par le juge Édouard Durand et Nathalie Mathieu, a recueilli quelque 30 000 témoignages. Ils ont servi de terreau au rapport rendu public en novembre 2023, comprenant 82 préconisations, sur le repérage des enfants victimes, le traitement judiciaire, la réparation et la prévention des violences sexuelles.
Que faire de ces témoignages, conservés par le service Archives des ministères sociaux ? Comment garantir leur pérennité, leur accès aux chercheurs qui travaillent sur ce phénomène de société ? Comment maintenir cette parole vivante ?
Alors secrétaire générale de la Ciivise, Alice Casagrande a sollicité l’expertise en archivistique de l’unité de recherche Temos. Une convention a été signée entre les deux structures. Elle a abouti au projet « Care - Connaître les Archives et Récits des adultes exposés aux violences sexuelles dans l'Enfance », copiloté par Bénédicte Grailles, Patrice Marcilloux, et Magalie Moysan, tous trois enseignants-chercheurs en archivistique.
Une variété de contributions
Concrètement, du 1er février à fin octobre 2025, un ingénieur d’études, Esteban Labarca, récemment diplômé du master Archives de l’Université d’Angers, s’est installé au cœur des bureaux parisiens de la Ciivise. Sa première tâche a été d’identifier les différents types de témoignages et les conditions de leur recueil : courriers papier numérisés, mails, messages sur la plateforme de témoignages, auditions individuelles ou réunions publiques. « La Ciivise a fait environ 25 réunions publiques dans toute la France. Les gens étaient invités à parler. Et c’est devenu, petit à petit, un espace de témoignages », précise Esteban Labarca. S’y ajoutent 10 000 réponses à un sondage, « avec une partie ouverte », et les appels reçus par des partenaires de la Ciivise, comme le Collectif féministe contre le viol, ou l’association SOS Kriz en Martinique.
Le second volet de la mission d’Estéban Labarca et des enseignants-chercheurs de l’UA a été de mettre au point un instrument de recherche, « qui permet d’avoir une connaissance fine du contenu de ces archives », explique Bénédicte Grailles. Vingt-trois critères ont été définis : profil du témoin, caractéristiques des violences, suites données à celles-ci, motivation du témoignage, qui contient ou non des recommandations…
À terme, l’objectif est de rendre l’outil accessible aux chercheurs mais aussi au grand public. « Il y a la volonté de la Ciivise d’être transparente sur ces témoignages et de montrer que la parole qui a été donnée n’a pas été perdue », insiste Bénédicte Grailles. « Il y a dans ces témoignages, des savoirs accumulés. La finalité, c’est de mettre ces “savoirs expérientiels” à disposition des chercheurs et au bénéfice de la société, pour que cela ne se reproduise pas », complète Patrice Marcilloux.
Une thèse en cours
Le projet qui touche à sa fin soulève, pour l’instant, des enjeux juridiques complexes, autour de l’anonymisation des récits. L’accès futur à ces archives qui comportent des données personnelles sensibles, et la mise en mémoire de ces témoignages seront au cœur d’une thèse d'archivistique, confiée à Esteban Labarca, financée par la Ciivise, qui s’étendra jusqu’en 2028.
Ce travail ne concerne pas que la Ciivise. D’autres commissions ont recueilli la parole de victimes. L’équipe de Temos, avec le renfort d’une ingénieure d’études, Camille Cousty-Médina, également issue du même master Archives, vient de se voir confier la conception de l’archivage de la Commission d'enquête indépendante sur les violences sexuelles et physiques commises à Notre-Dame-de-Bétharram.
